En 1996, un reportage diffusé à la télévision française — aujourd’hui archivé par l’Institut National de l’Audiovisuel (INA) — documente un phénomène encore marginal dans les médias de l’époque : l’émergence d’une esthétique propre aux jeunes de banlieue. Loin d’un simple effet de mode, cette affirmation stylistique est le reflet d’un mouvement culturel profond, porté par des jeunes issus des quartiers populaires qui, à travers leurs vêtements, revendiquent leur identité, leur créativité et leur appartenance.
Une mode codifiée, entre affirmation et résistance
Dans ce contexte, le style vestimentaire devient un langage. Les codes de la banlieue se construisent autour de pièces spécifiques : survêtements de marques (notamment Nike, Adidas, Sergio Tacchini), baskets montantes, jeans larges ou baggy, doudounes épaisses, casquettes vissées sur la tête, et coupe « 3 bandes » ou rasage très court. Chaque élément a une fonction symbolique. Il ne s’agit pas simplement de suivre une tendance, mais d’affirmer une appartenance à un territoire, à un groupe, à une réalité sociale.
Cette esthétique se détache volontairement des standards bourgeois ou classiques. Elle puise dans les influences venues des États-Unis — notamment le hip-hop et le streetwear new-yorkais — tout en les réinterprétant avec une touche locale, créant ainsi un style hybride et authentique, souvent perçu comme provocateur par le regard institutionnel de l’époque.